Pulixi Piergiorgio « L’Illusion du mal» (2022) 602 pages (Série Les chansons du mal tome 3

Pulixi Piergiorgio « L’Illusion du mal» (2022) 602 pages (Série Les chansons du mal tome 3

Auteur: né le 27 septembre 1982 (40 ans) à Cagliari) écrivain italien, auteur de romans policiers et de romans noirs, membre du collectif Mama Sabot , créé par Massimo Carlotto, dont il est l’élève.

Série : Les chansons du mal (commissaire Vito Strega)
Le chant des innocents ( Il canto degli innocenti 2015 – traduit en 2023) – La scelta del buio 2017 –  L’Illusion du mal (Un colpo al cuore 2021 – traduit en 2022) – La settima luna «(2022) 

Autres romans traduits:
L’Île des âmes (L’isola delle anime  Prix Scerbanenco (2019) 2021 – 

Série : Les chansons du mal (commissaire Vito Strega) Tome 03

Gallmeister – 01.09.2022 – 602 pages -/ Totem – 17.08.2023 – 582 pages  traduit par Anatole Pons-Reumaux

Résumé:

A travers toute l’Italie, les téléphones portables vibrent à l’unisson. En l’espace de quelques minutes, des milliers de personnes reçoivent une vidéo intitulée La loi, c’est toi. A l’écran, un criminel ligoté et un homme masqué qui prend la parole. Son objectif : faire voter en ligne le public sur le sort de son prisonnier, qu’un système judiciaire inefficace et corrompu a laissé impuni. La vindicte populaire est en marche. 

Mara Rais et Eva Croce, deux femmes aussi différentes qu’imprévisibles, sont chargées de l’enquête, épaulées par le criminologue Vito Strega. Confronté à un ennemi insaisissable à la popularité grandissante, le trio se lance dans une course contre la montre.

Mon avis:

Deuxième livre de cet auteur et deuxième coup de coeur . Suspense et émotions au rendez-vous.
Tout commence par l’acquittement d’un pédophile parce que les faits étaient prescrits. Et la violence va se déchainer, à tous les niveaux. Ce que j’ai particulièrement apprécié c’est, en plus de l’enquête, l’analyse de la société actuelle et les dérives dans plus d’un domaine.
Il s’agit de la suite des enquêtes de la série « les chansons du mal ». On y retrouve Vito Strega, qui sous des apparences de colosse est toujours fracturé à l’intérieur et   a besoin de nager, de faire un gros effort physique, pour faire retomber la pression. On y retrouve également la paire d’enquêtrices atypique et complémentaire Mara Rais et Eva Croce qui a aussi besoin de se défouler, de courir, de se mettre en danger, de faire du surf et ancienne élève de Strega dans un cours de criminologie.
Les trois sont des êtres solitaires qui ont vécu des drames et des tragédies personnelles et se retranchent derrière de carapaces. mais extrêmement humains et capables de se sacrifier et donner leur vie pour les autres.
Réseaux sociaux, opinion publique, force des médias, fake news, audimat, tabloïds,  manipulation, folie collective, hackers, technologie, lutte entre le bien et le mal, faiblesses et manquements du système judiciaire, dysfonctionnement de la justice, magistrats corrompus … et ce n’est pas tout…
Il y a aussi l’importance aussi de l’anonymat pour se défouler. Le « Dentiste » derrière son masque d’Arlequin qui n’a pas été choisi au hasard. En effet le personnage n’est pas lisse, c’est un pauvre type, il est intelligent mais subit puis se révolte. Et les personnes qui vont se déchainer sur les réseaux sont en grande partie des anonymes qui laissent leur haine déferler derrière leur écran. 

Je rappelle ce que j’avais dit dans le commentaire du premier tome : Le choix des noms est intéressant : « Strega » signifie sorcière et son ex-femme s’appelle maintenant « Purgatori » soit purgatoires. Ici nous pouvons ajouter Belladonna, – le chef de l’unité d’analyse du crime violent – qui n’est autre qu’une plante mortelle…

J’ai aussi adoré les touches régionales, et particulièrement les réactions en sarde, vénitien, sicilien, milanais

Extraits: 

C’est nous qui créons ce que nous voyons. Nous filtrons la réalité à travers nos structures mentales, nos a priori et nos convictions personnelles, et ça nous empêche de voir ce qu’on cherche. 

Vito Strega avait du mal à se reconnaître et à trouver sa place dans la société qui l’entourait, où tout un chacun exprimait des certitudes inébranlables, à commencer par ses collègues et ses supérieurs, alors que lui découvrait jour après jour qu’il en savait de moins en moins, et qu’avec le temps ses doutes se multipliaient.

cet instant, parée de la lumière féerique de l’aube, aucune pensée, aucune douleur, ni aucun souvenir n’aurait pu briser l’enchantement que lui offrait la mer.

Il songea que les réseaux sociaux étaient devenus le nouveau valium spirituel, un anesthésiant pour survivre à l’aliénation urbaine. La connexion numérique comme antidote à la déconnexion identitaire.

Qui détient le pouvoir détient aussi la justice. La manière dont l’État opère son magistère punitif est totalement inadaptée aux cas individuels.

la haine était l’engrais et la colère sociale le terreau. La virulence des réseaux sociaux se chargerait d’accélérer la contamination.

“EN ITALIE, le meurtre vend plus que le cul.”

Je pense qu’aujourd’hui, beaucoup de gens ont du mal à faire la différence entre le réel et le virtuel. Les réseaux sociaux brouillent les frontières entre la réalité et la fiction, et lui en a bien conscience. La voie de communication et la théâtralité du message conditionnent le jugement. 

Les réseaux sociaux dégoulinent de haine et de sang. Une campagne d’hostilité et de délégitimation s’est engagée contre nous et la justice, qui me laisse pantois.

Vito Strega s’était rendu compte que la nature de la lumière en Sardaigne était différente : elle avait un aspect lactescent, et la douceur enveloppante avec laquelle elle s’attardait sur les choses lui rappelait Marrakech, Marseille ou les villes du sud de l’Espagne.

Les réseaux sociaux créent une confusion entre les sphères publique et privée. Les névroses de la société contemporaine y trouvent leur défouloir et on assiste à une célébration narcissique permanente de l’individu qui, en se voyant au centre de l’attention, commence non seulement à s’identifier à cette fausse projection, mais, pour alimenter son besoin de reconnaissance sociale et se démarquer de la masse, se sent légitimé à libérer son animalité et ses instincts les plus barbares, ce qu’il n’oserait jamais faire dans la vie de tous les jours.

Vito Strega sentait que la science et la technologie informatique ne joueraient pas un rôle prépondérant dans la résolution de cette enquête complexe. Elles risquaient même de les induire en erreur. Il y avait une phrase qu’il aimait à répéter à ses étudiants en criminologie, et qui constituait la règle d’or du profilage criminel : “Si vous voulez comprendre un peintre, étudiez ses tableaux ; ils vous en diront beaucoup plus sur lui que n’importe quel témoignage.” Le même principe, expliquait-il, valait pour les tueurs en série. En analysant leurs crimes, en découvrant comment et pourquoi la victime avait été tuée, on avait beaucoup plus de chances de déterminer qui l’avait tuée. Comment + pourquoi = qui 

La haine est comme un orchestre. Elle a besoin de quelqu’un qui la dirige, qui fait monter la tension et la cadence, pour laisser ensuite exploser toute son impétuosité dans une chevauchée majestueuse. Mais tu sais quel est l’aspect de la haine qui me fascine le plus ? J’aime sa manière d’effacer les distances sociales… 

“Le secret pour ne pas vieillir est de vivre chaque jour en essayant d’être toujours à la hauteur de ses rêves. Le déclin commence quand tu cesses de rêver, quand tu n’as plus de désir et que tu te laisses porter par le courant.”

Je n’ai pas choisi de porter un masque parce que j’avais peur d’être identifié, mais seulement parce que l’homme qui se cache derrière ce masque n’est pas important. L’essentiel ce n’est pas moi… C’est le message dont je suis porteur qui doit être préservé et protégé.

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