Adam, Olivier « Et toute la vie devant nous » (RL2025) 320 pages

Adam, Olivier « Et toute la vie devant nous » (RL2025) 320 pages

Auteur : Olivier Adam est né à Paris le 12 juillet 1974. 

Romans: Je vais bien, ne t’en fais pas (Le Dilettante, 2000), A l’Ouest (2001), Poids léger (2002), Douanes (2004) Passer l’hiver (L’Olivier, Goncourt de la nouvelle 2004), Falaises (L’Olivier, 2005), À l’abri de rien (L’Olivier, prix France Télévisions 2007 et prix Jean-Amila-Meckert 2008), Des vents contraires (L’Olivier, Prix RTL/Lire 2009), Le Cœur régulier (L’Olivier, 2010), Les Lisières (2012), Peine perdue (2014) , La Renverse (2016) , Chanson de la ville silencieuse (2018), Une partie de badminton (2019), Tout peut s’oublier (2020) – Dessous les roses (2022), Personne n’a besoin de savoir (2023) – Il ne se passe jamais rien ici (2024) – Et toute la vie devant nous (2025) –
Plusieurs de ses romans ont été adaptés au cinéma ou à la télévision:
Poids léger – Je vais bien, ne t’en fais pas – À l’abri de rien (Maman est folle) – Des vents contraires – Le Cœur régulier

Flammarion – 13.08.2025 – 320 pages

Résumé:
« C’est au retour, dans la voiture, que nous avons commencé à nous raconter notre propre histoire. Ça te paraissait le bon moment pour tout récapituler, et nous dire ce que nous n’avions jamais réussi à nous dire jusqu’alors. Le bon moment aussi pour nous rappeler ensemble ce que nous avions partagé. »

Pourquoi Paul et Sarah se décident-ils à retisser le fil de quarante années d’amitié ? Est-ce pour tenter de comprendre l’insaisissable et irrésistible Alex, pierre angulaire de leur trio amical ? De leur enfance en banlieue pavillonnaire, où leur pacte s’est scellé à l’ombre d’un secret et dans le creuset de leurs aspirations communes, jusqu’à leur vie d’adultes et son lot de joies et d’épreuves, c’est peut-être aussi ce qui les a liés et déliés au fil du temps que ces « inséparables » cherchent à ausculter.

Dans cet ample roman qui embrasse l’histoire de trois amis, Olivier Adam traverse les époques en faisant résonner l’intime et le collectif, et met au jour ce que l’amitié grave d’indélébile dans nos vies.

Mon avis:
Une fois encore cet auteur me touche . Des personnages attachants, une traversée de la fin du XXème siècle et du début du XXIème … Beaucoup de sujets de société, beaucoup de pudeur et de tendresse…

40 ans de vie – entre 1985 et 2025. En 1985, ils avaient 10 ans quand ils se sont rencontrés et toute la vie devant eux…

Ce roman parle d’une amitié que l’on pourrait qualifier de fusionnelle entre trois jeunes, de leur enfance, leur adolescence, et de l’évolution de leur situation et partageant leurs espoirs, leurs malheurs, leurs échecs et leurs réussites, leur vie sentimentale… C’est une étude de société, toute une époque qui se déroule sous nos yeux et qui remonte … 1985, 1989, 1992, 1995, 2000, 2001, 2009, 2015, 2017, 2019, jusqu’à nos jours. Tout le roman est rythmé par la vie et les événements qui ont jalonné cette période ( politique, attentats, culture, évolution de la société…) 

Les drames de l’enfance, les copains, les relations familiales, les voisins, les différents quartiers et les différences sociales… Paul, Sarah et Alex ont des rêves d’artistes: peindre, écrire et publier de la poésie, jouer dans des pièces de théâtre. Alex c’est le dessin, Paul le piano et écriture, Sarah le théâtre. D’abord ils partagent tout, puis ils évoluent à des rythmes différents : Paul semble toujours plus enfant, Sarah ado et Alex presque adulte… Ils sont toujours amis mais moins fusionnels. L’adolescence et ses secrets… Puis viendra la période ou les trois amis se verrons toujours mais se confierons moins.
On parcourt les années en musique avec eux: l Supertramp, Bowie, Queen, Johnny, Eddy Mitchell, Michel Sardou, Claude François, Dalida, Barbara, Joe Dassin, Reggiani, Daho, Higelin, les Cure, Michel Jonasz, Jean-Jacques Goldman, Balavoine, Michel Bérenger, Souchon, Renaud, Cabrel, Nougaro, Julien Clerc, Françoise Hardy, France Gall, Jane Birkin, Veronique Sanson, les Rita Mitsouko, William Sheller, Madness, Mano Negra, Madonna, Leonard Cohen, Murat, Freddy Mercury,  Daho, Bowie, Queen, Elton John, Jimmy Sommerville, Les Pet Shop Boys, les Smiths, Leonard Cohen, Murat, Dominique A., Nick Cave, Axl Red …  , les cassettes BASF, les livres et les films des années 90, les boules à facettes, les séries de slows, les bars avec flipper et juke-box, les badges « touche pas à mon pote », les années Sida, les attitudes et les mots qui ne choquaient personne à l’époque et qui révoltent maintenant … 

Les trois inséparable vont évoluer, ils vont se marier, avoir des enfants…  Même s’ils ne suivent pas la même voie, le fil qui les relie ne va pas se casser. Tous trois sont reliés par ce qu’ils ont vécu, par leur passé, les traumatismes de l’enfant et de l’adolescence.. La mort d’un frère, la rencontre avec le prof de théâtre…Paul va devenir écrivain, ses romans seront le reflet de sa vie, très inspirés de son contexte social. Sarah va se sentir phagocytée par ces deux compères, elle dira même qu’elle les verra comme des vampires. Par-delà les drames, jusqu’au ira leur amitié ?

Extraits:

Te connaissant, je suis sûr qu’il traîne quelque part au fin fond des archives de ta vie. Tu as toujours tout gardé, tout conservé. J’ai toujours tout jeté, effacé. J’ignore ce que cela dit de chacun de nous. Quelles conclusions en tirer.

Cette façon que tu avais depuis toujours de te tenir en retrait, d’écouter, d’observer. Comme si tu emmagasinais pour plus tard. Pour quand tu aurais les armes. Pour quand tu saurais viser. Pour le moment tu les fourbissais. Lentement. Patiemment. Sans brûler les étapes. Tu faisais ton apprentissage. 

Mais Dieu sait qu’on pouvait être aveugles, dès lors qu’il s’agissait de soi. La clairvoyance, le nez au milieu de la figure, c’était toujours pour les autres. 

Je vous en voulais de n’avoir rien vu. Je vous en voulais d’avoir tout vu. Je vous en voulais de ne pas savoir entendre ce que je ne vous disais pas.

Évidemment, pour eux, « la vraie vie, les vrais gens » ça se résume au « social ». Tu es assistante sociale en établissement scolaire. À leurs yeux, ça signifie forcément parents endettés ou violents, pauvreté, maltraitance, pathologies mentales en tous genres. 

J’imagine que c’est pas forcément facile, de réaliser qu’on est attiré par les garçons. Surtout ici. Toi, tu t’es jamais posé la question ?
— Pas trop, non. Mais ce que je pense, c’est qu’on aime d’abord quelqu’un. Ça peut être un garçon. Ça peut être une fille.
— Je ne te parle pas d’aimer, je te parle de relations sexuelles.
— Je crois que l’un sans l’autre, ça ne m’intéresse pas vraiment.

Une page s’était tournée. C’est ce que font les enfants quand ils nous arrivent. Ils referment une page et en ouvrent une autre. Tout change. Ils nous accaparent. Nous engloutissent.

j’omettais consciencieusement de corriger mon interlocuteur quand il parlait des « petites gens », des banlieues « sordides », des « vies de peu », des gens « pas éduqués », de la « France d’en bas », des gens « qui ne sont rien », des « vies réduites et minuscules ».

Nous étions restés des enfants blessés. Nous avions besoin de consolation. Une consolation qui se passerait de mots, d’explications. Et nous étions les seuls à pouvoir nous l’apporter mutuellement.

Comme s’il n’avait jamais réfléchi à tout ça sous cet angle. Celui du silence nocif. Des secrets enfouis. Des blessures cachées qui n’en finissaient pas de s’infecter et de nous pourrir de l’intérieur. 

La fiction chez les écrivains, c’est ce à quoi ils se résignent quand ils n’ont pas une vie assez intéressante pour la raconter… Qu’est-ce que tu pourrais bien faire avec la tienne ?

On parlait de lui comme d’un « jeune espoir » et ça le faisait sourire.
— Il n’y a bien que dans l’art et la littérature qu’on peut être qualifié de « jeune » à quarante balais…

Et puis cette manière de toujours revenir en arrière, de tourner en rond, d’errer sans fin dans le labyrinthe de notre enfance, de notre adolescence, de notre jeunesse. Parfois je me demandais si ce socle commun n’était pas tout ce qui nous restait. Je voyais poindre le moment où le plus gros de ce que nous aurions à vivre ensemble consisterait à nous remémorer et à commenter le passé qui nous liait. 

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