Sorente Isabelle «Le complexe de la sorcière» (2020)
Autrice : Passionnée par les mathématiques, elle s’oriente d’abord vers des études scientifiques. Elle entre à Polytechnique, puis dans le Corps de l’aviation civile, où elle passe son brevet de pilote privé et s’essaie à la voltige aérienne. Elle suit en parallèle des cours de théâtre, notamment au Lucernaire et au cours Florent, où elle écrit et monte ses premières pièces. Le succès rencontré en 2001 par son premier roman, L, consacré au thème de l’addiction et à l’infantilisation des femmes dans une société conformiste, va la tourner définitivement vers l’écriture. Les thèmes de la métamorphose et de l’inassouvissement, la difficulté d’une quête spirituelle dans une société entièrement tournée vers la performance, sont omniprésents dans ses livres.
Elle a publié une autofiction, Le complexe de la sorcière (éditions J.C. Lattès, 2020), qui oscille entre travail de mémoire collective sur les chasses aux sorcières et introspection de la narratrice sur sa propre expérience de la persécution.
Les romans d’Isabelle Sorente traitent notamment de la cruauté des phénomènes contemporains, comme l’addiction dans L ou le racisme dans La Prière de septembre, ils exposent des personnages confrontés à leur démesure (Le Cœur de l’ogre), à leur fantaisie (Panique) ou à leur propre pouvoir de métamorphose (Transformations d’une femme).
JC Lattès – 08.01.2020 – 299 pages
Résumé : Le complexe de la sorcière est le récit d’une enquête. Enquête historique sur les chasses aux sorcières et découverte intime, vertigineuse, de l’empreinte qu’elles ont laissée. Car les milliers de femmes accusées nous hantent comme un secret de famille, réveillant nos souvenirs impensables, magiques, enfouis. Isabelle Sorente reconstitue l’histoire des grandes chasses et nous livre un roman bouleversant sur l’adolescence, la mémoire familiale et les initiations cruelles ou transformatrices.
Mon avis :
Une fois de plus, j’ai rendez-vous avec des sorcières… ou devrais-je dire simplement des femmes ?
D’un côté les sorcières, de l’autre les médecins ; la magie d’un côté et la psychologie de l’autre nous dit l’autrice… Le livre commençait bien… mais je dois dire que tout a été gâché par toute la partie autobiographique … Oui elle a vécu un calvaire à l’école ; oui elle a été le souffre-douleur de sa classe et ceci pendant plusieurs années ; oui elle n’avait pas les armes pour se défendre, ses parents n’ont pas compris ou n’ont pas voulu comprendre ; oui elle a vécu le martyr, terrifiée dans la cour d’école, terrifiée par les autres élèves. Elle a subi la domination masculine et a souffert d’être une fille qui n’ose pas se défendre. Elle se sentait différente, et a vécu une sorte de chasse aux sorcières… Oui il y a comme elle le dit « un lien entre les régimes totalitaires et les chasses aux sorcières » ; oui elle se sentait différente, moche, mal attifée, tenue à l’écart… Peut-être que ce dernier point me fait penser aux sorcières, condamnées sur leur physique, sur la réputation qu’on leur fait…
Pour moi la sorcière est une battante… et cette grosse partie « pleurniche » occulte les vraies réflexions intéressantes du livre sur le statut de la femme traquée car, d’une certaine façon, elle fait de l’ombre aux hommes par sa magie et ses dons.
J’ai eu l’impression que l’autrice passait son roman a parler de l’infériorité que la femme ressent par rapport à l’homme, qui se comporte comme l’inquisiteur face à la sorcière, usant de tous les moyens pour la faire ployer, elle qui est dejà à genoux.
Que l’autrice raconte sa scolarité misérabiliste et ses années de suivi psychologique, je le conçois et le respecte mais quelle déception quand on s’attend à une enquête sur la chasse aux sorcières, qu’elle soit actuelle ou historique…
Bref j’ai pas aimé… Je suis passée en tout cas tout à fait à coté… et si quelqu’un l’a lu… j’espère lire son avis …
Extraits :
C’est l’avantage de vieillir. On n’hésite plus à dire ce qui va mal, mais on apprend aussi à dire ce qui va bien.
Il existe une expression dans la langue française où le masculin ne l’emporte pas, c’est la chasse aux sorcières. C’est étrange, quand on y pense.
À peu près à l’heure où je me mets au travail, le chat sort par la fenêtre. Lorsque je le vois cavaler entre les arbustes pendant que je peine sous le regard des sorcières et des maîtres de la psyché, je me dis que j’aimerais bien être à sa place. Et puis j’essaie de chasser cette pensée. Parce qu’avec Carl Jung à ma gauche, je ne peux pas tout à fait exclure l’hypothèse de la réincarnation, et que renaître sous la forme d’un chat me ferait perdre tout espoir d’atteindre l’éveil. Déjà que c’est compliqué en tant que femme. Inutile de gâcher davantage mes chances.
au début du quinzième siècle, sorcier, c’est encore un métier d’homme. Même si les sages-femmes jettent des sorts à l’occasion, même si les guérisseuses connaissent l’usage des plantes, la magie demeure une carrière masculine.
Le portrait de la sorcière est partout. Les jeunes, les vieilles, les filles qui tournent la tête aux hommes, celles qui les font débander, celles qui ne vont pas à la messe, celles qui y vont trop souvent, les veuves, les célibataires, les femmes mariées, toutes cachent un maléfice.
Le principe de base de la psychogénéalogie, c’est que nos parents nous transmettent sans le savoir une « chose » qu’eux-mêmes ignorent avoir héritée de leurs parents, qui eux-mêmes ignorent en avoir hérité, un peu comme on se refile le Mistigri ou une patate chaude. Bien sûr la « chose » peut aussi être un don et il existe des transmissions inconscientes positives.
les psys n’ont aucune idée de la façon dont ces images se transmettent. La seule chose certaine, c’est qu’elles se transmettent d’inconscient à inconscient.
La grande découverte de la psychogénéalogie, c’est que certaines angoisses des patients, certaines coïncidences, certains accidents inexplicables s’expliquent par « l’héritage involontaire et inconscient de traumatismes d’événements affreux, donc indicibles
Notre entraînement commence dès que nous apprenons à parler. C’est le grand avantage que le masculin l’emporte. Entraînées à nous mettre à la place de l’autre, nous sommes.
Ce permanent soupçon de soi comme un reproche qui fredonne, musique dissonante du doute, écho des cris et du craquement.
Ce permanent soupçon de soi et tout ce qui s’ensuit, j’appelle ça complexe de la sorcière.
Parce que j’ai beau chercher, je ne vois pas comment appeler ça autrement.
Ces choses qui nous faisaient honte, ces choses qui nous faisaient peur et qu’on ne comprenait pas, on appelait ça nos démons, parfois nos névroses mais c’était plus rare. Je me dis aujourd’hui que la terminologie n’est jamais innocente.
Je ne peux m’empêcher de penser que les psys et les romanciers, et à plus forte raison les psys et les romancières, entretiennent un rapport analogue à celui des flics et des privés dans les films noirs. Les privés vont plus loin parce qu’ils ne sont pas tenus d’obéir aux règles officielles. Pour arriver à leurs fins, ils ont recours à des moyens violents et illégaux – entrer par effraction, harceler le suspect, mettre sa peau sur la table – qu’une institution ne permettrait jamais.
les sorcières étaient appelées bonnes femmes.
C’est de l’intérieur qu’on peut comprendre et changer. Sans quoi on commet cette erreur de parler à la place des autres, cette erreur de projeter nos fantasmes sur eux, cette erreur de tordre la vérité pour qu’elle ressemble à ce qu’on croit savoir. L’erreur de l’inquisiteur. Celle qui commence par une théorie et se termine par une séance de torture.
J’ai longtemps cru, je crois toujours, que les prières les plus profondes se passent de mots.
De l’Inde à la Méditerranée, l’araignée est le symbole d’une puissance ambivalente qui file à la fois le tissu des illusions et celui de la réalité.
Ma mère est plus que cinéphile. Elle est plus que lectrice. Les films et les romans lui procurent une joie que la réalité ne lui procure pas.
Ensuite je lis. Enfin, je ne lis pas, je me dissous, j’abandonne ma peau comme un vêtement dont j’ai honte pour que d’autres histoires m’enveloppent, peu importe lesquelles, pourvu qu’elles soient longues, pourvu que je m’oublie.
Il ne faut pas se mettre au niveau de l’agresseur. Il faut être au-dessus de ça. Je sais qu’elle est sincère quand elle dit ces choses-là, l’élégance est une qualité fondamentale aux yeux de ma mère.
Pour lui, les livres étaient vivants. « Si tu les écoutes, ils te parlent. Si tu leur parles, ils t’écoutent. »
Les manuels des inquisiteurs conseillaient d’adopter avec l’accusée un ton presque amical, paternel, enjôleur même au début de la procédure, quitte à lui promettre des choses qui ne seraient pas accordées, comme un allégement de ses supplices ou une mort rapide.
Ne laisse personne te priver de ton pouvoir spirituel. Parce que c’est bien de ça qu’il s’agit.
Quelques suggestions pour entrer dans l’Univers des sorcières… Modernes ou pas … De fiction ou pas…
Sorente Isabelle «le complexe de la sorcière» (2020) – Janicot, Stéphanie « Le réveil des sorcières » – Vandroux, Jacques « Le sceau des sorcières » – Atwood, Margaret« Graine de sorcière » – Volodine, Antoine « Frères sorcières » – Chollet, Mona « Sorcières – La puissance invaincue des femmes » – Masterton, Graham « La Cinquieme Sorcière » – Ben Jelloun, Tahar « Amours sorcières » – Läckberg, Camilla « La sorcière » – Delaume, Chloé « Les sorcières de la République » – Benzoni, Juliette « les joyaux de la sorcière » – Thorarinsson, Arni « Livre I de Journaliste Einar – Le temps de la sorcière » – De La Cruz, Melissa « (Trilogie) Les sorcières de North Hampton » – Langlois, Valérie « La dernière sorcière d’Écosse » – Rice, Anne « (Trilogie) Les sorcières Mayfair » – Calmel, Mireille « (Trilogie) Le chant des sorcières » – Coelho, Paulo « La sorcière de Portobello » – Hervé Gagnon «Fils de sorcière» – Philippe Madral «Une sorcière à la cour » – James Clemens série « les bannis et les proscrits » – MC Beaton « Sale temps pour les sorcières» – Vachss, Andrew « La sorcière de Brooklyn », La Série « Outlander » de Gabaldon, Diana , J. K. Rowling et la Saga Harry Potter…