Konate, Moussa « L’Affaire des coupeurs de têtes» (2015) –176 pages Série Commissaire Habib-Tome 06

Konate, Moussa « L’Affaire des coupeurs de têtes» (2015) –176 pages Série Commissaire Habib-Tome 06

Auteur : Moussa Konaté, né en 1951 à Kita, au Mali, et mort le 30 novembre 2013 à Limoges, est un écrivain malien. Cofondateur du festival Etonnants Voyageurs à Bamako, il était aussi dramaturge et éditeur. Diplômé en lettres de l’École normale supérieure de Bamako, il enseigna plusieurs années avant de se consacrer à l’écriture. Il est connu pour la publication de plusieurs romans policiers qui relatent les enquêtes du commissaire Habib.

Série Commissaire Habib. Enquête sur les rives du fleuve Niger :
Le Commissaire Habib : L’Assassin du Banconi – L’honneur des Keïta L’Empreinte du renardLa Malédiction du lamantinMeurtre à Tombouctou  ( En route pour Tombouctou) – L’Affaire des coupeurs de têtes
Le Mali, l’odeur et le bruit de l’Afrique, mais aussi la grande vibration populaire de la langue, toutes les facettes du rire et de l’humour, et ce grand tremblement permanent d’humanité. Sauf que lui, l’inspecteur Habib, et son inspecteur Sosso qui serait presque le personnage principal du livre, n’ont pas le temps de s’intéresser au tourisme.

«L’Affaire des coupeurs de têtes»  – les enquêtes du commissaire Habib – tome 6

Métairie Noir – 07.05.2015 – 150 pages – Points Policier 15.06.2017 –176 pages

Résumé : A Kita la foule venue accueillir l’équipe de foot est repartie de la gare en dansant et en abandonnant sur place un mendiant immobile et surtout sans tête. Dans la nuit un esprit vêtu de rouge est passé dans la colline armé d’une torche. Le matin suivant, un autre mendiant décapité a été trouvé au marché. Le commissaire Dembélé et son adjoint, le moderne Sy, sont dépassés par la situation. Les notables et les religieux y voient un châtiment de la dépravation moderne.
Le commissaire Habib est envoyé à leur rescousse, il connaît bien la ville et ses coutumes. Il sait résister aux pressions multiples. Habib et le jeune Sosso, son adjoint, mènent l’enquête, chacun selon son style et ses compétences, et évitent les embûches qu’on leur tend pour que rien ne bouge. Les cadavres sans tête se multiplient, les jeunes gens modernes font des affaires et les religieux prient.
Mais que deviennent ces têtes sans corps ? Moussa Konaté raconte avec talent et tendresse le village où il a passé son enfance, il met en scène les enjeux de la société malienne prise entre tradition et modernité, entre logique de l’Etat et religion musulmane. Son style ironique et plein d’humour donne un charme tout particulier à ce dernier roman écrit quelques mois avant sa mort.

Mon avis:

Et me voilà arrivée au terme de la série qui met en scène Habib, et son inspecteur Sosso. J’ai pris énormément de plaisir à parcourir le Mali avec eux, à découvrir leurs traditions et leurs coutumes et à découvrir les différentes ethnies.
Cette fois-ci, nous sommes à Kita, pays des ethnie Khassonkés et Malinkés, et avec comme toujours la présence des Peuls.
Des cadavres décapités, la révolte des jeunes, des apparitions sur la colline dépassent la police locale et Habib et Sosso sont envoyés sur place par  la sécurité intérieure pour épauler le commissaire Dembélé et le lieutenant Sy.
Comme il s’agit de la ville de naissance de Habib et qu’il est très connu sur place, c’est Sosso qui va se charger de mener l’enquête et Habib va devoir se borner à chercher le pourquoi.
Il est tentant de désigner le fou Ngaba, qui se promène avecun coupe-coupe suspendu au cou comme le coupable des décapitations. Mais Habib et Sosso ne sont pas de cet avis.
Ils vont devoir affronter le Prefet, la police locale- et ses problèmes internes – et les habitants persuadés qu’il ne faut pas contrarier les esprits des anciens qui sont fâchés par le mondialisation en marche…
Une fois encore la sagacité de nos deux enquêteurs va permettre de trouver les coupables et une fois encore j’ai beaucoup aimé.
Une série qui je recommande vivement.

Extraits:

Située au cœur du Manding, cette cité historique fut une des portes d’entrée des forces coloniales françaises et de l’Église catholique dans ce qui fut le Soudan, puis le Soudan français. 

Le Soudan français ayant acquis son indépendance, et ayant été baptisé Mali, la ville de Kita fut englobée dans une région, dont le chef-lieu était Kayes, à la frontière du Sénégal. 

Au crépuscule, les rues se vidaient, car c’était le moment de la journée où les mauvais esprits hantaient les cités humaines.

Puisque nos ancêtres sont en colère, nous ne pouvons plus compter sur leur protection. Ils ont donc laissé la place aux mauvais génies qui ne vivent que de la souffrance des humains. 

Aujourd’hui, j’ai de forts doutes, même si les coïncidences me paraissent toujours troublantes. Si un policier épouse de telles croyances, il n’a plus aucune raison de mener une enquête.

Il venait d’être confronté à deux visages de sa ville natale : celui du passé, désespéré parce que se sentant impuissant, et celui du présent, ignorant le passé et convaincu que l’avenir lui appartenait. Ainsi, comme partout ailleurs, à Kita aussi, les mentalités changeaient, les ancêtres perdaient de leur pouvoir. 

Si le nombre des victimes s’était limité à trois, symbole du sexe masculin, cela aurait signifié que seuls les hommes étaient sous la menace du tueur. Or il y avait eu quatre morts, le nombre quatre étant le symbole du sexe féminin. La conclusion était évidente : désormais et les hommes et les femmes risquaient leur vie.

Malheur à la goutte d’eau assoiffée de liberté qui se hasarderait à se balader à l’écart : elle serait condamnée à vivre éternellement dans une solitude douloureuse.

Tu as bien compris que pour être tranquille dans ce pays, il faut penser comme les autres. Or si tu agis ainsi, tu ne mèneras aucune enquête. Il faut donc assumer tes actes, accepter d’être un individu isolé, si tu ne veux pas te soumettre à la pensée unique. Ce n’est pas facile, mais c’est le prix à payer pour être libre.

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