Lenoir, Frédéric «L’oracle della Luna» (2006)
Auteur : né le 3 juin 1962 à Madagascar, est un sociologue, écrivain et conférencier français, docteur de l’École des hautes études en sciences sociales. Auteur d’une cinquantaine d’ouvrages, il écrit aussi pour le théâtre et la télévision. Il a publié plusieurs ouvrages de sociologie et d’histoire des religions, des romans traduits dans une vingtaine de langues, des livres sur les crises du monde qui appellent à une responsabilité individuelle et collective et des essais qui popularisent la philosophie auprès d’un large public.
Romans et contes : Le secret (2001) – La promesse de l’ange (en collaboration avec Violette Cabesos 2004) – L’oracle della Luna (2006) – La parole perdue (en collaboration avec Violette Cabesos – 2011) – L’Âme du monde (conte initiatique, Nil Éditions, 2012) – Nina (en collaboration avec Simonetta Greggio 2013) – Cœur de cristal, (conte, 2014) – La consolation de l’ange (2019)
Albin Michel – 04.10. 2006 – 617 pages / Livre de poche 07.05.2008 – 728 pages
Résumé : « Contemple, Giovanni, ton tragique et lumineux destin. L’acceptes-tu ? »Qui est Luna, la belle sorcière aux cheveux de feu ? Quelle malédiction frappe le blessé retrouvé dans sa cabane des Abruzzes ? Qui sont les hommes masqués de noir acharnés à sa perte ? Quelles paroles terribles dissimule ce mystérieux parchemin qui ne doit surtout pas arriver jusqu’aux mains du pape ?
Au coeur d’un XVIe siècle hanté par les querelles religieuses et philosophiques, le nouveau thriller historique de Frédéric Lenoir nous entraîne des palais aux prisons de Venise, du Mont Athos au bagne des corsaires d’Alger, de Jérusalem au ghetto de Chypre. Un grand roman d’amour et d’aventures où passion, mort, mystique chrétienne et soufie, astrologie et kabbale rythment la quête initiatique de Giovanni, le jeune paysan qui avait osé lever les yeux sur la fille des Doges.
Mon avis : Cela fait si longtemps qu’il était dans ma pile… mais pourquoi ne pas l’avoir sorti avant ? Un roman fleuve comme je les aime, avec évidemment le coté romantique, l’amour impossible et le coté apprentissage de la vie et du savoir, roman d’aventure…un excellent livre qui vous emporte loin du quotidien, vous permet de vous évader, de voyager. Car on voyage … principalement en Italie, mais pas que.
Maître Lucius lui enseigne les matières fondamentales telles que la philosophie, le latin, le grec, l’astrologie et son serviteur Pietro à l’entraîne à se battre. Et Frederic Lenoir, philosophe et historien des religions est passionnant.
Je suis toujours très bonne cliente pour ce genre de romans, les grandes fresques du style les romans de Ken Follett (« les piliers de la terre » – « Le siècle » ), d’Ildefonso Falcones, de Jean Diwo, ( « Les Dames du faubourg » (Trilogie) – «Le printemps des cathédrales» (2002) , les romans de Luca Di Fulvio ( « Le gang des rêves », « Les enfants de Venise », « Le soleil des rebelles », « Les prisonniers de la liberté », « L’apothicaire » (2011) d’Henry Loevenbruck, …
… Alors je ne sais pas si je suis bon juge… et comme en plus j’aime l’Italie et Venise… j’ai passé un excellent moment.
Extraits :
Platon avait connu le génial Socrate et le mettait en scène à travers des dialogues de son invention qui permettaient d’exposer de manière très vivante les thèses les plus importantes de sa philosophie. Aristote était resté pendant vingt ans à l’Académie, la célèbre école fondée par Platon. Puis il avait quitté son maître pour créer sa propre école, le Lycée. Son tempérament, comme son enseignement, différait en de nombreux points de son illustre maître. Autant Platon était un idéaliste tourné vers les choses célestes, préoccupé surtout de l’âme immortelle et rêvant d’une cité Idéale, autant Aristote était un réaliste qui tenta de bâtir sa philosophie à partir de sa seule expérience sensible et passa un temps considérable à observer la nature, les animaux et les humains.
Pic (de la Mirandole) entend montrer que la dignité de l’homme vient du fait qu’il est le seul être vivant dépourvu de nature propre qui le déterminerait vers tel ou tel comportement. Puisque l’homme n’est pas déterminé par sa nature, il est l’être le plus libre qui soit. Il peut choisir le bien et le mal, de vivre comme un ange ou de vivre comme une bête. Pic dit même que l’homme est créateur de sa propre vie. Cette pensée m’a profondément marqué ! Nous pouvons devenir ce que nous voulons.
Le 23 octobre, le Soleil entre en Scorpion. Ce deuxième signe de l’automne marque la mort de la végétation : l’herbe s’arrête de pousser, les feuilles tombent et pourrissent. Les natifs de ce signe sont puissamment marqués par cette force de transformation, de mort et de renaissance, qui peut les rendre angoissés ou destructeurs s’ils ne parviennent pas à réaliser leur alchimie intérieure qui les pousse à surmonter leurs puissants instincts et à accéder à une lumière supérieure, un secret caché.
« Vénitiens d’abord, chrétiens ensuite », comme dit l’adage ! Je vois que notre ami a bien compris ce qui donne sens à la politique de notre fière cité.
— Si Luther n’est pas l’Antéchrist, est-il le prophète annoncé par le grand astrologue arabe Albumazar, il y a plusieurs siècles ?
Il savait qu’à Venise, plus que partout ailleurs, l’apparence – celle du visage, du costume, de la maison, de la gondole – était tenue pour signe de noblesse et de raffinement. Un savant disgracieux ou mal vêtu semblait un rustre et un aristocrate mal logé perdait tout prestige.
— Vous savez parler aux femmes. Mais sachez que les choses de l’esprit m’importent plus que les apparences physiques ou les belles paroles.
— Je vous parle très sincèrement. Cela dit, je partage votre amour de ce qui réjouit l’âme plus que les sens. Mais je ne sépare pas le Beau du Bien. En disciple de Platon, je pense qu’un beau visage est un don de Dieu pour attacher un cœur et le conduire à la contemplation de la beauté et de la bonté divines.
Leurs doigts s’effleurèrent, comme deux pétales d’une même fleur qui se découvrent en se déployant pour la première fois au soleil.
— La peur du monde est en fait une peur de soi-même. Si tu as peur de toi-même, ton amour pour Dieu sera toujours limité et jamais tu ne parviendras à atteindre le but ultime de la vie spirituelle.
« Dieu a créé l’homme à Son image » signifie que l’homme est la seule créature terrestre qui porte l’empreinte de Dieu en elle. Cette empreinte, c’est notre intelligence rationnelle et notre volonté libre. L’être humain est bien le seul animal qui possède raison et libre arbitre. Par ces deux facultés, il peut atteindre à la ressemblance divine. Cette ressemblance n’est pas donnée d’emblée. Elle est présente en creux, en appel, en potentialité, en désir. C’est en s’appuyant sur les deux facultés divines que sont son intelligence et sa volonté que l’être humain, en pleine liberté, va aspirer à devenir semblable à Dieu. Et c’est avec le secours constant de la grâce divine qu’il y parviendra.
— Le seul mal qu’il faut vaincre dans ton cœur, mon enfant, c’est la peur. Tous les autres maux : la colère, la jalousie, la tristesse, la culpabilité morbide, proviennent de cet ennemi intérieur. Si tu arrives à dominer ta peur, plus rien ne t’atteindra, plus aucune force mauvaise n’aura d’emprise sur ton cœur. Et pour vaincre la peur, il n’y a qu’un remède : l’amour. Tout le chemin de la vie, c’est de passer de la peur à l’amour.
Tout ce qui tisse la trame de la vie de chaque être humain et de l’humanité entière était-il le fruit du hasard ou bien répondait-il à une supérieure et mystérieuse nécessité ?
Et puis, au fil des années, une évidence m’est apparue. Aussi surprenant que cela puisse paraître, ce n’est pas de la mort que nous avons le plus peur… mais de la vie !
— De la vie ! sursauta Ibrahim interloqué. Aussi douloureuse puisse-t-elle être, la vie n’est-elle pas notre bien le plus précieux ? Nous nous y accrochons tous avec ferveur.
— Oui, nous nous y accrochons, mais nous ne la vivons pas. Ou plutôt, nous nous cramponnons à l’existence. Or exister est un fait. Mais vivre, c’est un art.
Vois-tu, j’aime la beauté cachée, celle qui ne s’offre pas au premier venu, celle qui se laisse découvrir. C’est pourquoi j’ai appelé ma fille Esther. Ce prénom a une double signification. Il vient d’Astarté, la déesse phénicienne de l’amour, qui a donné Aphrodite chez les Grecs et Vénus chez les Romains. Mais en hébreu il veut dire « je cacherai ». Esther c’est l’astre le plus brillant, c’est l’amour ; prénom a une double signification. Il vient d’Astarté, la déesse phénicienne de l’amour, qui a donné Aphrodite chez les Grecs et Vénus chez les Romains. Mais en hébreu il veut dire « je cacherai ». Esther c’est l’astre le plus brillant, c’est l’amour ; mais qui reste caché par Dieu. Seuls ceux qui en sont dignes pourront le découvrir.
On pense habituellement qu’on doit pardonner aux hommes. Mais quand la vie nous a terriblement meurtris, c’est à Dieu qu’on en veut et c’est à Lui, puisqu’il est la Vie, qu’il faut pardonner.
Mieux encore, toutes les religions de l’époque, de Sumer, d’Assyrie et même d’Égypte, vénéraient la figure du taureau. C’est le culte du Minotaure ou du dieu égyptien Apis à tête de taureau. De manière symbolique, les caractéristiques du signe du Taureau correspondent bien à la naissance et à l’essor des premières civilisations qui donnèrent de puissantes assises à la vie sociale et politique. Puis, environ deux mille ans avant Jésus-Christ, le point vernal est passé, toujours à reculons, dans la constellation du Bélier. Le sacrifice religieux pratiqué alors, comme le montre celui d’Abraham, était celui d’un bélier. Le peuple hébreu descendant d’Abraham fera du bélier et de l’agneau les animaux sacrificiels par excellence. Mais on retrouve aussi partout la figure du bélier, comme en Égypte la prééminence d’Amon-Râ, le dieu solaire à tête de bélier. Symboliquement, le Bélier correspond à cette ère de conquête et au développement des grands empires égyptiens, perses, macédoniens et romains.
Cette femme n’inspirait pas seulement l’amour. Elle ne savait pas seulement merveilleusement converser sur l’amour. Elle était l’amour. Elle était tous les visages de l’amour : l’éros du désir, la philia de l’amitié et l’agapè du don de soi.
Image : Al-Kindî
One Reply to “Lenoir, Frédéric «L’oracle della Luna» (2006)”
Y a longtemps qu’il est dans ta pile, celui-là…
Voici ce que j’en avais écrit en octobre 2014:
« Les critiques lues évoquent, pour la plupart, un polar, un thriller historique…
C’est cela… et beaucoup plus.
Il y a aussi une histoire d’amour impossible et le parcours initiatique d’un homme.
Giovanni découvrira Venise et ses riches nobles, assez impitoyables avec ceux qui ne sont pas « nés » comme eux ; il découvrira l’astronomie, les religions, des lieux très différents, fera son chemin entre croyance et perte de la foi, entre recherche de l’amour et recherche de soi.
Même si ce n’est toujours facile à lire (beaucoup d’infos philosophiques et dogmatiques), le récit est prenant, agréable et je me suis attachée au personnage principal.
Bref, si cet ouvrage se trouve dans vos réserves, ou s’il vous tombe dans les mains… n’hésitez pas. »
Contente que ce récit t’ait plu, Soeurette 🙂
Et je pense que « La mémoire du monde », de Stéphanie Janicot devrait te plaire aussi !