Carofiglio, Gianrico «Témoin involontaire» (2007)

Carofiglio, Gianrico «Témoin involontaire» (2007)

Auteur : Gianrico Carofiglio est né à Bari le 30 mai 1961. Gianrico Carofiglio est le fils de l’écrivaine Enza Buono et le frère de l’écrivain Francesco Carofiglio. Il devient magistrat à Prato en 1986, puis procureur à Foggia et procureur adjoint à Bari où il est chargé des dossiers concernant la mafia. Il est élu sénateur en 2008. Procureur, conseiller du Comité anti-mafia au Parlement italien, il a été sénateur de 2008 à 2013. Ses romans et ses essais sont traduits dans le monde entier.

Série Guido Guerrieri : Témoin involontaire (2002 – 2007) – Les Yeux fermés (2003 – 2008)– Les Raisons du doute (2006 – 2010)  – Le Silence pour preuve (2010 – 2011)  – La regola dell’equilibrio (2014 – pas traduit)

Série Pietro Fenoglio : « Une vérité changeante » (2022) – «L’été froid» (2021) – La Version de Fenoglio (2023)

Autres romans traduits : Le Passé est une terre étrangère (2009) En attendant la vague, (2013). «Trois heures du matin»(2020)

Première sortie en français 05.11.2007 – Réédition Editions Rivages/Noir – 14.03.2018 – 314 pages – traduit par Claude Sophie Mazéas – Titre original  « Testimone inconsapevole »

Résumé :
A trente-huit ans, Guido Guerrieri, avocat à Bari, ne sait plus où il en est : sa femme l’a quitté, ses amis lui paraissent superficiels et son métier l’ennuie. Il reçoit un jour la visite d’une jeune femme noire dont le compagnon, un vendeur ambulant nommé Abdou Thiam, a été arrêté pour le meurtre d’un petit garçon. Tout incrimine Abdou, en particulier le témoignage accablant d’un patron de bar. Comment défendre un homme condamné d’avance ? Lorsque la visiteuse quitte son cabinet, Guido ne sait pas pourquoi il a accepté cette cause perdue, ni que cette affaire va radicalement changer sa vie.
Passionnante enquête qui se clôt par une mémorable joute au tribunal, ce premier roman installe Carofiglio, lui-même magistrat, comme un auteur incontournable du polar italien.

Mon avis :

Je continue ma découverte de cet auteur et c’est avec beaucoup d’intérêt que j’ai lu ce premier thriller de l’auteur ( et je vais continuer la série) .
Le moins que l’on puisse dire c’est que tous les protagonistes de ce drame ne sont pas au meilleur de leur forme !
Il y a tout d’abord Abdou Thiam, un africain qui vend des articles sur la plage et qui est accusé du meurtre d’un petit garçon de 9 ans.
Il y a l’avocat, Guido Guerreri, qui traverse une crise existentielle et qui remet toute sa vie en question.. Il vient de se séparer de sa femme Sara après 10 ans de vie commune et il perd complètement pied.
Et il y a Margherita, la voisine du 7ème… qui elle aussi doit surmonter un lourd passé.

Au moment où l’avocat accepte de défendre Abdou, il n’a qu’un seul argument : sa conviction personnelle que le Sénégalais est innocent. C’est léger pour aller au procès ; mais comme le Sénégalais refuse de plaider coupable d’un meurtre qu’il n’a pas commis, il va bien falloir se battre…
Pas évident de démonter l’accusation quand tout semble condamner ..
C’est là que le fait que l’auteur soit procureur fait toute la différence …
Entre mensonge et vérité, entre faits avérés et souvenirs, entre certitude et  mémoire, la frontière est souvent ténue…
Un thriller juridique psychologique passionnant ! et une analyse des personnages qui montre une empathie et montre que quelque soit le contexte, le passé, il faut toujours croire en l’avenir et en soi.
Et en bande son, le sublime album « Rimmel » de Francesco de Gregori… Merci à l’auteur d’avoir ressuscité ce 33-tours qui a tourné en boucle sur mon tourne-disque il y a bien longtemps…

Extraits :

C’est drôle, à y repenser aujourd’hui. Je vivais dans la peur d’être submergé par la peur.

Après avoir décidé de me passer de la psychiatrie moderne, je m’efforçai de chercher quelque chose d’autre en guise de dérivatif. Et je réalisai que j’avais envie de cogner.
En y repensant, je me rendis compte qu’il s’agissait d’une des rares choses authentiques de ma vie. L’odeur du cuir des gants, les coups – en donner et en recevoir –, la douche chaude, pour s’apercevoir que pendant deux heures, pas une pensée ne vous a effleuré l’esprit.

On procède tous par stéréotypes. Ceux qui disent le contraire sont des menteurs.

Pour comprendre si quelqu’un est franc du collier ou pas, la seule méthode efficace est de regarder – et d’écouter – son rire. Les personnes qui valent vraiment la peine sont celles qui savent rire.

Moi, j’ai toujours pensé être plus intelligent que les autres. Ça n’est pas une chance, mais c’est difficile à comprendre. Si on pense être plus intelligent que les autres, il y a plein de choses qu’on ne comprend pas, jusqu’à ce qu’elles te tombent dessus. Mais alors, c’est trop tard. »

Quelque chose allait arriver – devait arriver – et on le sentait. Le temps se bandait comme un arc, prêt à nous expédier Dieu sait où.
Cet après-midi-là, je me sentais comme ça, comme dans ces graffitis de mon adolescence.

Je commençai à examiner les livres sur les étagères, comme j’ai l’habitude de le faire quand je vais dans une maison inconnue.

À l’époque, je n’étais pas assez lucide pour formuler une hypothèse de ce genre, donc je tournais tout simplement à vide.
Il n’est pas bon, pour un avocat, d’avoir ce genre de craquements dans la tête à la veille d’un procès pareil. Et ce n’est surtout pas bon pour le client dudit avocat. L’avocat se prépare à s’étaler. Le client s’achemine vers l’abattoir.

On s’attache même à la douleur, au désespoir. Quand on a énormément souffert pour une personne, le fait que la douleur s’apaise nous effare. Parce que nous croyons que cela veut dire, une fois encore, que tout, vraiment tout, a une fin.

« Il pourrait. Le conditionnel s’impose.
« Cependant, les sentences ne s’écrivent pas – elles ne peuvent pas s’écrire – au conditionnel. Elles s’écrivent à l’indicatif, en affirmant des certitudes. Des certitudes.

Je songeais aux comptes qu’on arrête ; aux choses qui commencent. Je songeais que j’avais peur, mais que, pour la première fois, je ne voulais pas la fuir, cette peur, me la cacher. Ça me semblait quelque chose de terrible, et de magnifique.

 

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