Feuz, Nicolas « Les extradées » (2024) 336 pages (Série Jemsen tome 7)

Auteur : Né en 1971, Nicolas Feuz a exercé les professions d’avocat et de juge d’instruction. Il est actuellement procureur de la République du canton de Neuchâtel, en Suisse. Depuis plus de 16 ans, il s’est spécialisé dans la lutte contre le trafic de stupéfiants. Nicolas Feuz a étudié le droit à l’Université et obtenu le brevet d’avocat, avant d’être élu en 1999 comme juge d’instruction, puis en 2008 comme président du collège des juges d’instruction, et enfin en 2011 comme procureur de cette petite République helvétique. En 2010, il s’est lancé dans l’écriture de romans noirs, mêlant librement réalité du terrain et fictions obscures.
Romans:
La Série Mike Donner :
– EMORATA, pour quelques grammes de chair (2014)
– EUNOTO, les noces de sang (2017)
– La TrilogieMassaï (ILMORAN, l’avènement du guerrier (2010) – ILAYOK, le berceau de la folie (2011) – ILPAYIANI, le crépuscule massaï (2012) –
Dipyque du confinement:
– Restez chez vous(2020) – Le Calendrier de l’Après (2020)
Série Jemsen : – Le Miroir des âmes (23.08.2018) – L’ombre du Renard (22.08.2019) – L’engrenage du mal (2020)- Brume rouge (23.02 2022) – Les larmes du lagon (10.11.2022) – Le Philatéliste (2023) – Les extradées (3.10.2024)
Autres: La septième vigne (2013)– Les Bouches (2015) – Horrora borealis (2016)- Heresix (2021)
Rosie & Wolf – 3.10.2023 –336 pages
Résumé:
Une adolescente victime de harcèlement sur les réseaux sociaux se suicide.
Le même jour, sa seule amie disparaît.
Au même moment, dans une prison de la région, cinq détenues subissent la loi d’une agente de détention. Ce sont des extradées. Des femmes bannies du système. Des destins brisés.
Quel est le lien entre tous ces personnages ?
Le procureur Norbert Jemsen mène l’enquête dont les fils vont se croiser avant de se rejoindre dans un dénouement époustouflant.
Mon avis:
Comme toujours notre Procureur ne fait pas dans la dentelle, mais là j’ai été cueillie de plein fouet par une saturation de violence. Dans la première partie du livre, on prend plein la tête de la violence carcérale : l’auteur décrit la vie d’un groupe de cinq prisonnières avec une violence inouïe! Entre les prisonnières et les matonnes, on se demande bien lesquelles sont les pires !
J’ai été toute contente de retrouver le Procureur Jemsen, Flavie (sa greffière) et son amie Tanja alias Alba qui a été extradée et est détenue à la prison pour femmes de Lonay.
On pourrait dire qu’il y a deux ambiances et du suspens dans deux récits parallèles : l’atmosphère carcérale et l’atmosphère enquête. Et connaissant l’auteur, les deux contextes sont tendus! Suspense et angoisse sont bien au rendez-vous, le tout sur un rythme rapide qui ne permet pas de décompresser! La tension est au rendez-vous ! Et elle le restera jusqu’au final qui est juste grandiose !
Coté huis-clos carcéral:
A Lonay, nous allons faire la connaissance des femmes incarcérées avec Tanja et découvrir peu à peu le lien qui les relie alors qu’au début rien ne semble les concerner toutes.: Tanja/Alba, Coralie, Louise, Pilar, Steva, Clem… Elles sont d’origines différentes – Serbe, Jamaïcaine, Albanaise, Suisse – et la cohabitation est un véritable enfer. Tanja, au sortir du mitard, va devoir partager sa cellule avec une petite nouvelle, Coralie, qui semble complètement paumée et certaine de sortir le lendemain. Elle est sacrément en décalage avec les bombes dégoupillées qui l’entourent. D’ailleurs son entourage est une véritable jungle.. Entre la lionne, la tigresse, la hyène (Majo la surveillante)..
Coté enquête: Une collaboration inter-cantonale des polices neuchâteloise, vaudoise et fribourgeoise. Deux gamines de 12 ans, au centre de l’enquête : celle retrouvée morte (elle était victime de harcèlement ) et à la disparition de sa meilleure amie.
Je pense que les liens entre les personnages sont importants et que lire cet opus sans avoir fait connaissance des personnages dans les tomes précédents serait très dommage, même si c’est tout a fait possible. .
Extraits:
Elle avait eu tant de fausses identités dans sa misérable existence qu’elle ne savait plus qui elle était vraiment, ni quel était son véritable nom. Depuis la mort des siens, elle errait de cage en cage comme une orpheline dont les parents adoptifs auraient changé le prénom, en perte totale de repères, incapable de remonter jusqu’à ses racines.
Ne fais pas de vague, fonds-toi dans la masse des détenues et fais-toi oublier. Dans cet enfer, seules les ombres ne craignent pas les brûlures du soleil.
Tu crois savoir, tu communiques. Tu crois informer, mais tu désinformes. Et tout se déforme, parce que tout est exagéré. La rumeur est un fléau destructeur, amplifié par l’enfermement et les secrets de chacune.
Le moindre acte d’enquête nécessite du temps. Et du temps, nous n’en avons pas.
— Ça a toujours été comme ça. Nous ne sommes pas dans une série télé où tout se résout en quarante-cinq minutes. Nous ne sommes que des humains, nous faisons tout ce que nous pouvons avec les moyens que nous avons à disposition. Le plus humainement possible.
La correspondance écrite reste le dernier droit inattaquable d’un détenu, quand les visites et les coups de téléphone lui sont refusés. Les courriers passent par la censure du ministère public, le greffe les lit avant de les expédier plus loin. Tu n’as juste pas le droit de mentionner l’enquête en cours dans tes lettres, sinon elles te sont renvoyées. Mais tant que tu écris des banalités, ça passe.
La nuit enveloppait la Broye de son voile noir. Le nom de la région venait du celte brogi, qui signifiait pays, terroir ou territoire.
Les facultés de réflexion de cette femme sont aussi obtuses que celles d’un oursin trépané.
— Une image plutôt piquante,
Image : centre de détention de Lonay